Congé pour travaux et DPE G : Peut-on rompre un bail pour rénover un logement énergivore ?

Depuis la décision de la Cour d’Appel de Bordeaux du 16 novembre 2023, les propriétaires de logements classés DPE G doivent faire face à une réglementation de plus en plus stricte. Cette jurisprudence a rappelé que donner congé à un locataire pour réaliser des travaux de rénovation énergétique n’est pas un motif valable de reprise du logement, sauf exceptions précises.

Avec l’interdiction progressive de location des passoires thermiques, de nombreux bailleurs se retrouvent contraints de repenser leur stratégie pour éviter une vacance prolongée ou des sanctions. Quelles sont les solutions possibles ? Comment concilier obligations légales et rentabilité locative ? Cet article fait le point sur les règles en vigueur, les alternatives possibles et les stratégies à adopter pour éviter les écueils juridiques.

Comprendre l’interdiction de location des logements classés DPE G

La réglementation énergétique impose un calendrier strict concernant la mise en conformité des logements énergivores. Dès 2025, il sera interdit de louer un bien classé G au Diagnostic de Performance Énergétique (DPE), et cette restriction s’étendra progressivement aux logements classés F en 2028 et E en 2034.

Pourquoi cette interdiction ?

L’objectif de cette mesure est de réduire la consommation énergétique des logements et d’encourager les propriétaires à entreprendre des travaux de rénovation. Les passoires thermiques, souvent mal isolées et énergivores, contribuent fortement aux émissions de CO₂ et entraînent des factures énergétiques élevées pour les locataires.

Quelles conséquences pour les bailleurs ?

Un propriétaire qui ne réalise pas les travaux requis avant la date limite ne pourra plus mettre son bien en location.

Le risque est double :

  • Une perte de revenus locatifs en cas d’impossibilité de louer.
  • Une dévalorisation du bien immobilier, les logements énergivores étant de moins en moins attractifs sur le marché.

Ainsi, pour éviter ces sanctions, de nombreux bailleurs cherchent à engager des travaux d’amélioration énergétique, ce qui soulève une question essentielle : est-il possible de donner congé à un locataire pour réaliser ces travaux ? Nous explorons cette question dans la partie suivante.

Peut-on donner congé à un locataire pour réaliser des travaux de rénovation énergétique ?

Face à l’interdiction imminente de location des logements classés DPE G, certains propriétaires souhaitent récupérer leur bien pour effectuer des travaux de rénovation. Cependant, donner congé à un locataire pour ce motif est strictement encadré par la loi.

Les motifs valables pour donner congé à un locataire

Un propriétaire ne peut donner congé à un locataire que pour trois raisons légales :

  1. La reprise du logement pour y habiter ou y loger un proche.
  2. La vente du bien, impliquant la fin du bail.
  3. Le congé pour motif légitime et sérieux, qui peut inclure des travaux sous certaines conditions.

Les travaux de rénovation énergétique peuvent donc justifier un congé uniquement s’ils rendent le logement inhabitable pendant leur durée. Toutefois, il ne s’agit pas d’un motif automatique et des restrictions s’appliquent.

Les conditions pour donner congé en raison de travaux

Si un bailleur souhaite récupérer son logement pour rénovation énergétique, il doit prouver que :

  • Les travaux sont d’une ampleur telle que le logement sera inhabitable pendant plusieurs mois.
  • Ils nécessitent l’évacuation complète du bien (réfection totale de l’isolation, changement du système de chauffage, etc.).
  • Les délais et la nature des travaux sont justifiés par des documents officiels, comme un devis d’entreprise ou un permis de construire en cas de rénovation lourde.

Si ces critères ne sont pas réunis, le locataire peut contester le congé et rester dans les lieux jusqu’à la fin de son bail.

Que risque un propriétaire en cas de congé abusif ?

Un congé donné sans motif valable peut être considéré comme frauduleux et entraîner :

  • L’obligation de reloger le locataire ou de lui verser une indemnisation.
  • Une amende et des poursuites judiciaires en cas de manœuvre frauduleuse.

En pratique, pour réaliser des travaux tout en respectant la loi, il est préférable d’informer le locataire et d’envisager une solution amiable, comme une indemnisation ou une proposition de relogement temporaire. La partie suivante explore les meilleures stratégies pour concilier rénovation et respect du bail locatif.

Comment concilier rénovation énergétique et bail en cours ?

Les propriétaires dont le logement est classé DPE G doivent trouver des solutions pour réaliser les travaux de rénovation énergétique sans contrevenir aux droits du locataire. Plusieurs options existent pour mener à bien ces rénovations tout en respectant le cadre légal.

Négocier une résiliation anticipée du bail avec le locataire

Plutôt que de donner congé unilatéralement, le bailleur peut proposer une résiliation amiable. Cette solution permet d’éviter un contentieux juridique et facilite le déroulement des travaux.

  • Indemnisation financière : Offrir une compensation pour inciter le locataire à partir volontairement.
  • Relogement temporaire : Proposer une solution de logement durant les travaux, avec un retour possible après la rénovation.
  • Engagement sur un logement rénové : Le locataire peut être prioritaire pour revenir dans le bien rénové avec un bail conforme à la nouvelle réglementation.

Réaliser les travaux en présence du locataire

Si la rénovation ne rend pas le logement totalement inhabitable, il est possible d’effectuer les travaux avec le locataire en place. Toutefois, cela implique plusieurs précautions :

  • Prévenir le locataire en respectant un délai de préavis raisonnable.
  • S’accorder sur un calendrier de travaux pour limiter les désagréments.
  • Négocier une réduction de loyer temporaire en compensation des nuisances.

Toutefois, si les travaux sont très lourds (ex. isolation complète, changement du chauffage central), cette option peut être difficile à mettre en œuvre.

Attendre la fin du bail pour rénover

Si aucune solution amiable n’est trouvée et que le locataire refuse de partir, le propriétaire peut attendre l’échéance du bail pour :

  • Donner congé pour vente, si le bien est revendu après rénovation.
  • Donner congé pour reprise, s’il souhaite occuper le bien lui-même.
  • Attendre un départ naturel du locataire, avant d’entamer les travaux.

Quelle stratégie adopter ?

La meilleure approche dépend de l’ampleur des travaux et du profil du locataire. Si une négociation est possible, elle reste la solution la plus simple. Dans tous les cas, les contraintes légales sont strictes, et le propriétaire doit s’assurer de respecter le droit au maintien dans les lieux du locataire avant d’initier une quelconque procédure de congé.

Dans la conclusion, nous récapitulons les éléments clés pour une transition vers un logement rénové et conforme aux nouvelles exigences.

Conclusion

La Cour d’Appel de Bordeaux, dans sa décision du 16 novembre 2023, a clairement posé un cadre plus strict quant aux congés pour travaux des logements classés DPE G. Il est désormais essentiel pour les propriétaires d’anticiper les évolutions réglementaires et de bien évaluer leurs options avant d’engager des démarches risquées.

La rénovation énergétique reste une priorité pour pérenniser son investissement locatif, mais elle doit être réalisée dans le respect des droits du locataire et des conditions légales imposées.

Dans un marché locatif en mutation, chaque bailleur doit s’adapter pour optimiser la performance énergétique de son bien et assurer sa rentabilité.

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